Série noire au Congo (RDC)

 

Kinshasa: l'An-26 s'écrase sur la ville

 
 

Nouveau drame aérien au Congo, officiellement République Démocratique du Congo et ex Zaïre pour les historiens.

Après son décollage de l’aéroport de Ndjili, un Antonov 26 cargo n’arrive pas à prendre de l’altitude et s’écrase sur un quartier de Kinshasa. Une cinquantaine de morts serait à déplorer mais le bilan macabre change d’heure en heure. A bord de l’avion, on indique 27, puis seulement 13 passagers ainsi que 3, puis 5 membres d’équipage. Au sol, plusieurs maisons sont détruites et leurs occupants s’ajoutent à la liste des victimes.

L'avion, un Antonov 26 de la compagnie "AfricaOne", affrété par la société Malila Airlift, "a raté son décollage" et s'est écrasé vers 10H40, selon le communiqué officiel.

L'appareil, qui devait rejoindre la ville de Tshikapa, à 650 km de là, dans le centre de la République démocratique du Congo, a touché une dizaine de maisons avant de prendre feu. "On a entendu un grondement de moteur. L'avion volait très bas. Il s'est écrasé sur une première maison, les ailes se sont cassées, puis il a touché d'autres maisons et tout a pris feu", a déclaré un habitant du quartier, qui se trouvait à moins de 500 mètres du lieu de l'accident. "C'était horrible. Il y avait des corps calcinés partout".

Plusieurs témoins ont affirmé que les camions anti-incendie de la Régie des voies aériennes (RVA, aéronautique civile) dépêchés sur place n'avaient pas réussi à éteindre le feu, qui a entièrement consumé l'appareil. "Ce sont les pompiers de la Mission de l'ONU en RDC qui ont éteint l’incendie."

Le mécanicien de bord, Dede Ngamba, unique rescapé, a déjà indiqué une cause possible, voire probable de l’accident :

« Nous avons décollé après 3 minutes de taxi. Aussitôt j’ai constaté que l’avion s’est mis à tanguer et l’effort du pilote de faire monter l’avion est demeuré vain. A ce moment, l’avion a commencé à voler plus bas, à percuter des palmiers et a perdu une aile.

Lorsque l’avion a commencé à percuter les maisons, tous les colis de marchandises qui étaient à bord ont fait mouvement vers l’avant de l’avion. J’ai aperçu à côté de moi un trou par lequel je suis sorti sans savoir comment. Je suis tombé sur une flaque d’eau sablonneuse. J’ai pu alors contempler les flammes de l’avion qui se consumait. Il s’agit en fait d’une simple défaillance mécanique. »

 Pour ses pratiques dangereuses, la compagnie Africa One avait été clouée au sol par arrêté ministériel congolais, mais avait étrangement récupéré ses certificats très récemment, le 15 septembre dernier. De plus les avions russes étaient mis à l’index, trop vieux et mal entretenus et 24 Antonov de différents types, immatriculés en RDC avaient même dépassé leur potentiel de vol selon un état communiqué par le constructeur lui-même. Interdits de vol dans un premier temps par le ministre des transports, il y a deux mois, ils avaient pu reprendre à nouveau du service.

Série noire, fatalité ou carences en série, depuis le début de l’année, 6 accidents ont endeuillé le pays tuant une trentaine de personnes, mais chacun, au Congo se souvient de cet An-32 qui s’était écrasé sur un marché, déjà à Kinshasa, tuant 350 personnes en 1996. "Le cercueil volant a encore tué" peut-on lire dans la presse.

Ainsi, régulièrement, les journalistes et de nombreux politiciens dénoncent l’incurie du gouvernement pour gérer le transport aérien ou faire simplement appliquer la réglementation.  Trop d’intérêts sont en jeu occasionnant des passe-droits qui s’avèrent tôt ou tard dangereux.

 Deux jours après ce nouveau crash, le Président du Congo a sans plus attendre limogé son ministre des transports alors que les députés de l’assemblée nationale congolaise l’attendait en séance plénière pour l’interroger sur l’état du transport aérien. Une occasion ratée pour connaître peut-être enfin les dessous d’une industrie lucrative.

 
     

 

 

 

 

L'Antonov 32 a immédiatement pris feu après avoir explosé. Seul le mécanicien de bord a pu s'échapper du brasier.

 

   

Deux vues de l'Antonov An-26, un avion russe rustique, parfaitement adapté à l'Afrique à la condition toutefois de subir un entretien correct. Souvent, ce sont des équipages russes qui opèrent, en possédant une expérience non négligeable sur l'avion.

L'habitude dangereuse dans cette partie du monde est d'oublier la notion même de devis de poids et de laisser décoller les avions en surcharge systématique. La moindre panne alors ne pardonne pas.

     

 

 

La police a eu du mal à contenir la foule ainsi que de nombreux pillards qui n'emportent parfois que quelques bouts de ferraille.

       

3 jours après l'accident, le bilan des victimes est toujours provisoire avec 37 morts et une trentaine de blessés. L'incendie que l'on croyait maitrisé a repris autour de l'épave, obligeant les secours, principalement de la croix rouge, à s'éloigner de la zone.

             

"Au moins onze corps ont été sortis du site du crash. Ce sont des gens qui ont été tués dans l'effondrement de leurs maisons. Nous avons aussi appris qu'une fillette gravement brûlée était morte à l'hôpital général", a déclaré le directeur adjoint du cabinet du ministre des Affaires humanitaires.

"Le bilan de l'accident est désormais de 50 morts", a-t-il ajouté, précisant qu'il s'agissait toujours d'un bilan provisoire pouvant encore s'alourdir du fait du nombre important de grands brûlés admis à l'hôpital général Mama Yemo.

 

Que croyez-vous qui va changer après ce

 crash ?

Samedi, deux jours après le drame, les vieux avions de fabrication soviétique de type Antonov et Iliouchine continuaient à voler, sans aucune restriction, en République démocratique du Congo, selon des sources aéroportuaires.

"Rien que ce matin (samedi), trois Antonov des compagnies (privées congolaises) Bleu Airlines, Air Kasaï et Tom Airways ont décollé de Kinshasa à destination de Tshikapa (au Kasaï occidental, centre)", a déclaré une source aéroportuaire.

"Nous n'avons reçu aucun document demandant la restriction des vols pour les Antonov ou d'autres types d'avion. On ne peut rien faire si les compagnies se présentent avec des autorisations validées par Kinshasa", a déclaré un responsable de l'aéroport de Lubumbashi.

    Après 4 jours de recherches, le    bilan de ce crash s'établit à

50 morts et 30 blessés

Selon "Radio Okapi-Congo", le député national Laurent Ndaye a rendu public une lettre datée du 12 septembre dernier et signée par Maître Nkulu, ministre d’Etat près le président de la République. La lettre enjoignait au ministre des Transports de lever sa mesure du 26 août interdisant à un certain nombre d’avion de voler. Pour l’honorable Laurent Ndaye, le gouvernement a privilégié les intérêts économiques au détriment de la population.

« Nous sommes tous concernés par ce crash. Le ministre des Transports avait institué une commission de vérification de contrôle technique, notamment pour les avions de type Antonov. Ce que je dénonce aujourd’hui, c’est le fait que, à notre grande surprise, le ministre a été contraint de revenir sur la mesure suite à une injonction lui donnée par le ministre d’Etat près la présidence de la République, dans sa lettre du 12 septembre 2007. C’est suite à cette lettre que ces cercueils volant ont repris leurs vols, pour qu’on puisse privilégier les intérêts économiques en lieu et place des vies humaines. Parce qu’en fait, dans la lettre du ministre d’Etat, il est fait mention des manques à gagner des compagnies aériennes. Entre-temps, le ministre des Transports a été révoqué. C’est pour qu’on cache la vérité. Pour nous opposants [politiques], les responsabilités incombent au ministre d’Etat près la présidence de la République. »